P.-J. Proudhon

Front Cover
F. Sartorius, 1858 - Anarchists - 60 pages
 

Selected pages

Other editions - View all

Common terms and phrases

Popular passages

Page 16 - Tout le jour, je me remplissais de mûres, de raiponces, de salsifis des prés, de pois verts, de graines de pavots, d'épis de maïs grillés, de baies de toutes sortes, prunelles, blessons, alises, merises, églantines, lambrusques, fruits sauvages; je me gorgeais d'une masse de crudités à faire crever un petit bourgeois élevé gentiment, et qui ne produisaient d'autre effet sur mon estomac que de me donner le soir un formidable appétit. L'aime Nature ne fait mal à ceux qui lui appartiennent...
Page 11 - Ce qui se passa je ne le saurais dire : suffit que le garde rentra chez lui éreinté, et rendit l'âme avant le vingtième jour. Au lit de mort, il refusa de déclarer le meurtrier, connu de tout le monde; il dit qu'il n'avait que ce qu'il méritait.
Page 12 - ... comme une punition du ciel, et la misère qui accablait le peuple comme leur conséquence : Chrétiens, contemplons les fléaux Dont Dieu punit nos crimes. Ma mère nous les chantait encore; j'ai oublié la suite. Ma mère, sa fille de prédilection, pleura ce père deux longues années ; sa femme, qu'il avait épousée éprise d'un autre amour, mais dont il avait su se faire accueillir, perdit les yeux de chagrin. Montrez-moi un pape, un empereur qui ait excité autant de regrets...
Page 17 - Que d'ondées j'ai essuyées! que de fois, trempé jusqu'aux os, j'ai séché mes habits sur mon corps à la bise ou au soleil! Que de bains pris à toute heure, l'été dans la rivière, l'hiver dans les sources! Je grimpais sur les arbres; je me fourrais dans les cavernes ; j'attrapais les grenouilles à la course, les écrevisses dans leurs trous, au risque de rencontrer une affreuse salamandre; puis je faisais sans désemparer griller ma chasse sur les charbons...
Page 17 - Que de bains pris à toute heure, l'été dans la rivière, l'hiver dans les sources ! Je grimpais sur les arbres; je me fourrais dans les cavernes ; j'attrapais les grenouilles à la course, les écrevisses dans leurs trous, au risque de rencontrer une affreuse salamandre ; puis je faisais sans désemparer griller ma chasse sur les charbons. Il ya, de l'homme à la bête, à tout ce qui existe, des sympathies et des haines secrètes dont la civilisation ôte le sentiment. J'aimais mes vaches, mais...
Page 12 - Tournés! mourut dans l'hiver de 89, d'une chute qu'il fit sur cet affreux verglas d'impérissable mémoire. Il allait de maison en maison, chantant des complaintes révolutionnaires, dans lesquelles, suivant le style du temps, les institutions féodales étaient représentées comme une punition du ciel, et la misère qui accablait le peuple comme leur conséquence : Chrétiens, contemplons les fléaux Dont Dieu punit nos crimes.
Page 15 - ... les verts turquies, dans la terre profonde et fraîche ! Plus d'une fois, par les chaudes matinées de juin, il m'est arrivé de quitter mes habits et de prendre sur la pelouse un bain de rosée.
Page 11 - ... justice du seigneur qui jugeait. Il fut ruiné en amendes. Un jour, en plein midi, le garde Brézet le surprend, avec sa voiture et ses chevaux, en récidive. Il était allé chercher un arbre dont il avait besoin pour le faîte de sa maison ; et comme, malgré les condamnations, il n'entendait pas laisser périmer le droit, il ne se cachait point. — Comment t'appelles-tu? lui dit le garde. Je te dénonce procès-verbal. — Je m'appelle Retournes-y, répond l'autre en jouant sur son sobriquet....
Page 15 - Quel plaisir autrefois de me rouler dans les hautes herbes, que j'aurais voulu brouter comme mes vaches ; de courir pieds nus sur les sentiers unis...
Page 14 - Que voulez-vous? je ne demanderais pas mieux que de m'enrichir; jo crois que la richesse est bonne de sa nature et qu'elle sied à tout le monde, même au philosophe. Mais je suis difficile sur les moyens, et ceux dont j'aimerais à me servir ne sont pas à ma portée. Puis ce n'est rien pour moi de faire fortune tant qu'il existe des pauvres. Sous ce rapport je dis comme César : Rien de fait tant qu'il reste à faire.

Bibliographic information