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MASSALIENS. On donne le nom de massaliens ou prieurs (Massaavot; cf. l'hébreu] Metsalaïn, Esdras VI, 10), et celui d'euchites ou d'euphémites, aux membres d'une secte non chrétienne qui parut en Asie Mineure au milieu du quatrième siècle. Sortis de l'hellénisme, ils en reconnaissaient toutes les divinités, mais ne rendaient les honneurs de l'adoration qu'au Dieu tout-puissant. En réalité, ils sont déistes, car ce n'est que par accommodation qu'ils se rattachaient à la religion historique de la Grèce; le christianisme issu des controverses du quatrième siècle ne les attirait pas. L'ascétisme qu'ils pratiquaient, tout aussi bien que la sécheresse de leurs conceptions religieuses, ne leur donna que peu de crédit parmi leurs contemporains. Persécutés par l'Eglise, ils prirent le nom de martyriens. A la même époque, vers 360, nous voyons le même nom adopté par des moines vagabonds, comme les sarabaïtes et les remoboth; on les appelait aussi euchites, euphémites, enthousiastes, pneumatiques, eusthatiens, adelphiens, etc. Ils affirmaient que l'homme étant placé par sa naissance sous l'empire des démons, la prière seule est capable de le sauver, en mettant le prieur dans une étroite communion avec Dieu; ces rapports intimes avec Dieu délivraient le fidèle de ses péchés et lui permettaient de prédire l'avenir et de contempler face à face la sainte Trinité. Le prieur devenait ainsi l'égal des prophètes et même de Jésus ; ils représentaient d'ailleurs l'union de l'âme avec Dieu sous les traits les plus sensuels. L'orgueil spirituel qui les aveuglait leur fit supprimer tout culte et rejeter tous les sacrements. Ce n'est pas à tort que l'Eglise leur a reproché leur profonde immoralité. Vivant d'aumônes, parce que le travail est incompatible avec la vie parfaite, on peut les considérer comme les précurseurs des ordres mendiants. Les danses mystiques auxquelles ils se livraient leur ont valu le nom de choreutes. Les moines massaliens se répandirent en grand nombre dans les cloitres de Syrie; mais leurs doctrines furent réfutées, leurs partisans anathématisés et enfin leurs monastères réduits en cendres; ils disparurent assez rapidement. Les mêmes noms furent encore portés par des moines dualistes du onzième siècle, qui habitaient la Thrace. Ils se divisaient en deux partis. Les dualistes modérés enseignaient que le fils aîné du Dieu suprême, s'étant révolté contre lui, avait créé le monde visible, pour avoir un royaume indépendant à gouverner; mais son frère Christ travaille à détruire cet empire du mal et le rétablissement final doit couronner son œuvre de salut. Les dualistes absolus professaient au contraire le même respect pour la divinité malfaisante et le Dieu bon. Ces gnostiques n'étaient sans doute qu'une branche des pauliciens. - Voyez Epiphane, Hær., 80; Théodoret, Hæret. fab., IV, 11; Chastel, Histoire du christianisme, 1881, II, 411 ss.; Herzog, Real-Encykl., art. Massaliens; Herzog, Abriss der gesammten Kircheng., 1879, I, 398; II, 26. 126. 292). EDOUARD MONTET.

MATAMOROS (Manuel), protestant espagnol, né à Lepe, dans la province de Huelva, en 1835. Se conformant aux vœux de son père qui était capitaine d'artillerie, il entra en 1850 à l'école militaire de Tolède; il la quitta, repoussé par les mœurs grossières qui y régnaient, pour retourner auprès de sa mère à Malaga. En 1853, il se rendit à Gibraltar

où il fit la connaissance de Francisco de Paulo Ruet, qui avait été gagné à l'Evangile par la prédication de De Sanctis à Turin, et qui avait d'abord essayé de fonder une communauté évangélique à Barcelone. L'étude du Nouveau Testament produisit une profonde impression sur Matamoros et acheva sa conversion. Entré au service militaire, il fit une propagande active parmi ses camarades. Un peu plus tard, par l'intermédiaire de Ruet, il entra en rapport avec un comité écossais, puis parisien, pour travailler à l'évangélisation de l'Espagne à Grenade, Séville et Barcelone (1860). Dans le même temps, un simple chapelier, José Alhama, converti par un petit traité américain, prêchait l'Evangile à Grenade. Arrêté par suite des manœuvres des prêtres, il fut trouvé en possession de lettres de Matamoros, de Marin, de Carrasco et de Gonzalez qui furent tous arrêtés. Conduit à Grenade, Matamoros dut languir pendant plus de deux ans dans les cachots de cette ville où il contracta le germe de la maladie qui l'emporta si prématurément. Grâce aux efforts de l'alliance évangélique, qui, en 1863, envoya une députation à Madrid, et à l'action personnelle de la maison royale de Prusse, la condamnation à neuf ans de galères fut commuée en autant d'années d'exil. Alhama s'établit à Gibraltar, Marin et Gonzalez se fixèrent à Bayonne, puis à Bordeaux, pendant que Matamoros alla en Angleterre où il fut fêté comme un martyr de l'Evangile. De là, il se rendit à Lausanne où il suivit les cours de la Faculté de théologie libre, ainsi qu'un certain nombre de jeunes Espagnols qu'il avait fait venir de Malaga et des environs. Atteint de la poitrine, Matamoros mourut le 31 juillet 1866, avant d'avoir pu recevoir la consécration au saint ministère qui avait été le rêve de sa vie et l'objet de son ambition suprême.

MATHIEU (Jacques-Marie-Adrien-Césaire), prélat et cardinal français, né à Paris, en 1796, mort à Besançon en 1875. Il étudia d'abord le droit, mais il quitta l'école pour aller gérer, dans les Landes, les biens de M. de Montmorency qui, dans la suite, lui ouvrit la carrière des dignités ecclésiastiques. Il entra au séminaire de Saint-Sulpice, fut ordonné prêtre, devint secrétaire de l'évêque d'Evreux (1823), et, peu de temps après, l'un des grands vicaires de M. de Quélen à Paris. En 1833, il fut nommé évêque de Langres, et, l'année suivante, promu au siège archiépiscopal de Besançon; il reçut le chapeau de cardinal en 1850. Membre du Sénat, il se montra défenseur zélé des droits de l'Eglise et, en janvier 1865, un recours comme d'abus fut formé devant le Conseil d'Etat contre lui pour avoir lu, malgré l'interdiction du gouvernement, l'Encyclique du pape du 8 décembre précédent: l'abus fut prononcé par décret du 8 février 1865. On cite, du cardinal Mathieu, des Mandements, dirigés contre l'Université, l'esprit philosophique et quelques-unes des inventions modernes qu'il regardait comme des fléaux divins. Il faut signaler encore, parmi ses brochures, le Pouvoir temporel des papes justifié par l'histoire, 1863.

MAURICE (Frédéric Denison), théologien anglais, né en 1805, mort en 1872. Fils d'un pasteur unitaire, il étudia au collège de la Trinité de Cambridge, prit ses degrés à Oxford et entra, en 1828, au service de l'Eglise établie. Il édita quelque temps l'Athenæum, et écrivit un roman,

Eustache Conway, qui eut du succès. Mais ses tendances libérales et un discours qui parut entaché d'hérésie lui firent perdre la chaire de théologie qu'il avait obtenue au collège du Roi, à Londres. Il prit avec le rév. Kingsley une part active à l'organisation des associations de travailleurs, ainsi qu'à l'instruction des enfants du peuple et devint chapelain de la Société de Lincoln's Inn. - Parmi les nombreuses publications de Maurice, nous mentionnerons: 1° Essais théologiques, 2 vol.; 2o Les religions du monde et leurs rapports avec le christianisme, 1852; 3° Histoire des deux premiers siècles de l'Eglise, 1854; 4o Les patriarches et les législateurs de l'Ancien Testament, 1855; 5o La religion catholique romaine, 1855; 6o Les doctrines philosophiques du moyen âge.

MEIJBOOM (Louis-Suson-Pedro), prédicateur et mythographe néerlandais, né à Emden (Frise orientale), le 2 avril 1817. Il fit de brillantes études philosophiques et théologiques à l'université de Groningue où le lettré Pareau exerça sur lui une influence décisive et où il prit le grade de docteur en théologie. Des vocations pastorales l'appelèrent successivement à Hoornhuizen, Nimègue, Groningue (1840-54), où il retrouva ses maîtres et défendit dans le journal Vérité et Charité (Waarheid en Liefde) les idées de l'école néo-orthodoxe qui avait à sa tête le professeur Hofstede de Groot. C'est dans cette première phase de sa carrière, qu'il acquit ce talent de catéchète et d'initiateur populaire, qui devait le faire appeler sur un plus grand théâtre. En 1854, il fut nommé pasteur à Amsterdam, malgré les protestations ardentes du parti orthodoxe et, pendant les vingt années de ministère qu'il y exerça, Meij boom acquit une grande réputation par ses prédications originales, ses conférences sur l'histoire naturelle et l'astronomie, et ses écrits à la tendance néo-chrétienne. En effet, l'ancien disciple de l'école de Groningue s'était rallié aux doctrines du protestantisme libéral tout en tenant ferme dans sa foi en un Dieu personnel, en un Christ historique, en l'immortalité de l'âme et en l'énergie incessante de l'Esprit saint, dans l'Eglise. Dans les dernières années, il s'était consacré spécialement à l'étude des langues du Nord et de la mythologie scandinave, sur laquelle il a laissé un ouvrage de premier ordre. Il mourut le 13 novembre 1874, dans la plénitude de ses facultés et de sa foi chrétienne. On a de lui: OEuvres d'Hemsterhuys, avec préface en français, 3 vol., Leeuwarde, 1845-48; Histoire du royaume de Dieu, d'après la Bible, 3 vol. Groningue, 1852-54; Vie de Jésus, Groningue, 1854-74; La Religion des anciens Normands, 2 vol., Haarlem, 1868-70; Récits énigmatiques (Radselachtige Verhalen), Groningue, 1872; Principes de la tendance néo-chrétienne (2o éd., avec portrait de l'auteur), Haarlem, 1874.

MÉSENGUY (François-Philippe) naquit d'une famille pauvre et obscure, à Beauvais, le 22 août 1677. Son père, simple ouvrier, s'efforça de lui faire donner les premiers éléments d'une instruction modeste; le jeune Mésenguy, ayant montré des aptitudes remarquables pour retenir ce qui lui était enseigné, obtint d'entrer au collège de sa ville natale où il fit ses humanités. Envoyé plus tard à Paris au séminaire des Trente-trois,

il s'y fit remarquer autant par la vivacité de son intelligence que par la pureté de ses mœurs. L'année même de son entrée au séminaire (1694), étant âgé de dix-sept ans, Mésenguy, nous dit un de ses biographes, «<fut touché de l'esprit de Dieu, d'une manière particulière le jour de la Pentecôte, » par l'impression que firent sur lui les sentiments exprimés dans l'hymne Veni Creator. Entré dans l'état ecclésiastique il ne voulut pas en dépasser les 'ordres mineurs, et demeura toute sa vie simple acolyte. Revenu à Beauvais, il y professa pendant sept ans les classes de cinquième, de seconde et de rhétorique au collège de cette ville. Mais, étant retourné à Paris, le célèbre Rollin (voir cet article), alors principal du collège dit de Beauvais, lui confia la direction d'une classe importante de son établissement dont Mésenguy devint sous-principal dans la suite. par la protection de Coffin (voir cet article), successeur de Rollin. Obligé de quitter sa charge à cause de son opposition à la bulle Unigenitus, il prit un emploi à la paroisse de Saint-Etienne-du-Mont où il essuya de nouveaux ennuis pour les mêmes motifs. Il se retira dès lors à SaintGermain-en-Laye où il passa les dernières années de sa vie dans la prière et dans la retraite, et où il s'éteignit le 19 février 1763, âgé de 85 ans et six mois. Homme d'une piété tendre et pleine de ferveur, d'un caractère candide et doux, de moeurs simples et pures, Mésenguy est une des plus nobles figures de son temps, et ses ennemis mêmes ont dù rendre justice à l'intégrité de sa vie et à la beauté de son âme. Humaniste distingué, théologien plein de science et d'érudition, il écrivait avec clarté; son style est correct, facile, et non dépourvu d'onetion. On a de lui: 1o Idée de la vie et de l'esprit de Messire Nicolas Choart de Buzanval, évêque et comte de Beauvais, avec un Abrégé de la vie de M. Hermant, Paris, 1717, 1 vol. in-12; ce qui concerne Hermant est un résumé de la vie de ce dernier par Baillet (voir ces deux noms); 2o Le nouveau testament de notre Seigneur Jésus-Christ, traduit en françois, avec des notes littérales pour en faciliter l'intelligence, Paris, 1729, 1730, 1 vol. in-12; 1752, 3 vol. in-12. On sait d'avance ce que peut être une version faite d'après une autre version; mais, de toutes les traductions de la Vulgate, celle-ci est peut-être la plus remarquable; c'est ce qu'a dù penser le vénérable M. de Saci, de l'Académie française, lorsqu'il a fait entrer la traduction de Mésenguy dans sa belle «Bibliothèque spirituelle » publiée il y a quelques années. Il est à regretter qu'il n'en ait par reproduit les notes qui sont fort bien faites. Qu'il nous soit permis de les signaler ici comme un travail excellent, surtout à ceux qui voudraient entreprendre un travail d'annotations sur le Nouveau Testament. Les notes de Mésenguy pourraient être largement utilisées ainsi que celles de Huré, pour une édition annotée du livre de Dieu; 3° Vies des saints pour tous les jours de l'année, avec les Mystères de Notre-Seigneur, Paris, 1730, 6 vol. in-12, ou 2 vol. in-4°; nouv. édit. augmentée de pratiques et de prières, Paris, 1734, ou 1740, 2 vol. in-4°. De cet ouvrage, Mésenguy n'a composé que les mois de janvier, de février et les douze premiers jours de mars; tout le reste est de l'abbé Goujet (voir ce nom dans le présent supplément). Mésenguy interrompit ce travail pour pouvoir se consacrer plus entièrement, sur la demande que lui en fit Rollin, à

l'ouvrage suivant; 4° Abrégé de l'histoire et de la morale de l'Ancien Testament, où l'on a conservé autant qu'il a été possible les propres paroles de l'Ecriture Sainte, avec des éclaircissements, Paris, 1728, in-12, nombreuses éditions depuis, et même en ce siècle; 50 Abrégé de l'histoire de l'Ancien Testament, où l'on a conservé, etc., Paris, 1737-1738, 3 vol. in 12, et 1735 à 1753, 10 vol. in-12; c'est le premier travail progressivement développé et qui constitue un ouvrage digne d'être tiré de l'oubli où il est tombé. L'intolérance ultramontaine l'a frappé d'un discrédit que d'autres chrétiens peuvent ne pas accepter sans contrôle, et, s'ils voulaient se donner la peine de l'examiner, ils en seraient largement récompensés par le profit qu'ils en retireraient. Les réflexions du pieux auteur, à la fois explicatives et pratiques, ont parfois une fraicheur de pensée et une suavité d'expérience auxquelles le lecteur chrétien n'est pas accoutumé dans les travaux de ce genre. Le Xme volume renferme une sorte de concordance des préceptes moraux des hagiographes, et une analyse des prophètes; 6o Refonte du bréviaire Vintimille (édition de 1745); 7° Missel de Paris, 1738, production liturgique de premier ordre qui dénote chez son auteur une science consommée de l'Ecriture; les introit et les diverses antiennes y sont choisis avec un à-propos merveilleux. Pour donner les passages bibliques avec une telle justesse d'adaptation à chaque solennité, il fallait posséder l'Ecriture avec une rare perfection; 8° le Processional de Paris, 1739, auquel s'appliquent les mêmes remarques faites sur le Missel. Le plain-chant qui accompagne ce processional est aussi dù à notre auteur; 9° Chant des offices propres au diocèse de Montpellier et du supplément au Missel, 1736, publié par le célèbre Colbert, évêque de Montpellier, qu'en style janséniste, comme le fait remarquer Sainte-Beuve, on nomme le grand Colbert; 10° Exposition de la doctrine chrétienne, ou Instructions sur les principales vérités de la religion, Utrecht (Paris), 1744, 6 vol. in-12; nouv. édit., Cologne (Paris), 1754, 4 vol. in-12, petit caractère; 1758, 4 vol. in-12, ou un vol. in-4°. Instructions rédigées en vue des élèves du collège de Beauvais et complétées ensuite à la demande de Coffin qui s'en servit dans ses leçons de religion à ses écoliers. En faisant les réserves voulues au sujet d'un ouvrage composé avec les préventions du système catholique romain, ou peut dire que celui-ci est réellement admirable. Lu et médité avec une foi éclairée, ce livre, trop perdu de vue, peut être d'une grande utilité aux prédicateurs de l'Evangile. Condamnée par un bref de Clément XIII, en date du 14 jutn 1761, l'Exposition n'en fit pas moins son chemin, et il serait à souhaiter qu'elle l'eût poursuivi jusqu'à aujourd'hui où elle demeure flétrie pour les uns et oubliée pour les autres; 11° Entretiens de Théophile et d'Eugène, sur la religion chrétienne, avec un discours sur la nécessité de l'étudier, et une bibliothèque chrétienne, s. 1., 1760, 1 vol. in-12, tiré de l'ouvrage précédent; 12° Exercices de piété tirés de l'Ecriture sainte et des Prières de l'Eglise (et non des « Pères de l'Eglise » comme l'écrit Quérard), 1760, 1 vol. in-18; composé pour les élèves du collège de Beauvais; 13° La Constitution Unigenitus adressée à un laïc de province, avec l'appel des quatre évêques, 1748, 1 vol. in-12; 14° Epitres et Evangiles des

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