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eft pas comme de notre jour naturel ou la lumiere & les ténébres font féparées, mais il en eft comme d'un matin où quoique la lumiere regne, elle regne pourtant meflée avec l'obfcurité. C'est une fainteté qui eft complete & entiere à l'égard de fes parties, toutes les vertus qui la doivent composer y font, & tous les vices qui la détruifent en font chaffés, mais c'est-à-dire que toutes les vertus y font encore infirmes & languiffantes, & que les vices n'y font pas tout à fait déracinés. Cela n'empêche pourtant pas qu'il ne foit vrai que la regénération Chrétiendonne une inclination univerfelle

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pour le bien, & une averfion générale pour le mal, encore que cette inclination & cette averfion ne foient pas dans le dernier degré de leur perfection. Il en eft à peu près du nouvel homme dans la grace comme d'un jeune enfant dans la nature, il a toutes les parties effentielles qui le doivent composer, un corps & un ame, un corps fourni de tous fes différens organes extérieurs & intérieurs un ame douée de toutes fes puiffances, bien que tout cela foit encore foible, & fort éloigné de ce qu'il fera dans l'âge de virilité.

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Pour faire donc un jufte examen de

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nous-mêmes, il nous faut reconnoître fur ce point & voir fi nous trouverons en nous cette juftice univerfelle, cette inclination générale pour toute forte de bonnes œuvres, & cette averfion pour toute forte de vices. Car fi dans le cours de notre vie nous découvrons quelques habitudes au mal, de forte que nos vices & nos vertus marchent enfemble, & faffent comme deux lignes paralelles c'eft une marque certaine qu'il n'y a point en nous de véritable regénération.

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Un quatriéme caractère de cette veritable regénération c'eft l'humilité dans la pratique des vertus & dans la fuite des péchés. En effet un homme non regénéré qui par la force de quelqu'un de ces principes que nous avons déjà marqués vivra moralement bien , ne manquera jamais de devenir fier & orgueilleux par le fentiment de fa probité. Car comme c'eft l'amour propre, & non la crainte de Dieu qui regne dans fon cœur, par une fuite néceffaire il faut qu'il rapporte à fa propre gloire tout ce qu'il voit de bon en lui, qu'il s'en faffe un fond d'eftime ou comme parle un Prophête qu'il encenfe à fes rets & qu'il facrifie à fes filets. Mais au contraire

comme

c'est l'amour de Dieu qui regne dans le cœur d'un vrai fidele, & qu'il le regarde toujours comme fa derniere fin ou comme fon principal objet, il ne fe peut qu'il ne raporte à la gloire de Dieu tout ce qu'il voit en luimême de bon, & qu'il ne s'en tienne obligé comme d'une grace qu'il a reçue. Dans le fentiment de fes meilleures actions, il faut donc néceffairement qu'il demeure humilié, quelque joie qu'll en ait, , parce que plus il fait de bonnes œuvres, plus il fe trouve près de Dieu, & plus par conféquent eft-il ébloui de toutes parts de fa majefté infinie. Plus il fait du bien, plus il penfe à Dieu, & plus il y penfe plus fe compare-t-il avec lui, & fe reconnoit cendre & poudre dans cette comparaifon. Quand David a dit au Pleaume fecond, fervez l'Eternel en crainte, rejouiffez-vous devant lui avec tremblement; il n'a pas eu deffein de nous infpirer la frayeur ou l'épouvante, car la frayeur n'eft pas compatible avec la joie, & elle eft plus propre à nous faire fuir la présence de Dieu qu'à nous en faire approcher pour le fervir. Il a donc voulu feulement nous marquer l'humilité qui ne refifte point à la joie & qui eft la compagnie in

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féparable des bonnes œuvres du fidele.

Enfin un cinquième caractère qu'il faut remarquer fur ce fujet; eft qu'un vrai fidele ne fait jamais de bonnes œu vres, ni ne fe détourne des occafions de péché, qu'il ne lui refte toujours un défir ardent d'aller plus loin & de s'avancer de plus en plus dans la fainteté. La raison de cela eft que le fidele trouve dans les bonnes œuvres qu'il fait des fignes & des témoignages de fon élec tion, & de fa communion avec J C., & qu'au contrair fa confiance à cet égard eft troublée par les péchés qu'il commet. C'est ce qui produit en lui à la vue de fes bonnes œuvres cette joie inénarrable & glorieufe ( Pier. 1.) dont l'Ecriture parle, cette Paix de Dieu dont S. Paul dit quelle furpaffe toute intelligence, (Phil. 4.) ce repos & cette affurance qui faifoit dire à David, l'Eternel eft ma lumiere de qui aurai-je peur l'Eternel eft la force de ma vie de qui aurai-je frayeur? ( Pf. 27.) Mais c'eft ce qui produit auffi le defir dont je parle, de fe confir mer toujours dans le bien, car il regarde fes bonnes ceuvres comme de ga ges de l'amour que Dieu lui porte, & comme des fondemens de la grande ef

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pérance qu'il a D'où il s'enfuit, qu'il fouhaite fans ceffe de faire des progrès dans la fainteté, puisqu'à mesure que fa fainteté s'avance le fentiment de fon électioa & de fa communion avec Jefus-Chrift fon Sauveur s'avance auffi, & fon efpérance s'affermit de plus en plus; au lieu que par fes péchés la premiere de ces chofes eft fort troublée, & la feconde fort ébranlée. D'ailleurs plus il s'avance dans la fainteté, plus il eft perfuadé qu'il fait fon devoir, & qu'il eft agréable à Dieu, à caufe de quoi les bonnes œuvres qu'il fait lui font elles-mêmes un éguillon, & un encouragement pour l'avenir. Ce qu'on dit par opprobre d'un avare qu'il n'eft jamais content de ce qu'il a qu'il eft toujours altéré; nous le pouvons dire en titre de louange, d'un homme de bien qu'il fe fait un tréfor de fes bonnes actions; il ne dit jamais, c'eft affez il fouhaite fans ceffe d'en augmenter le nombre, à cause dequoi Jefus Chrift lui attribue une faim, & une foif; Bienheureux il, font ceux qui ont faim & foif de jufice. (Mat. 5.)

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dit

Il n'en eft pas ainfi d'un homme non regénéré, car quand il fera quelques actions moralement bonnes ou

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par

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