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SES PREMIÈRES ANNÉES, SA PRÉDICATION, SES DERNIERS MYSTÈRES

I.

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39.

PRÉLIMINAIRES

1o De l'Évangile en général et de l'étude
qu'il faut en faire.

Titres, ordre chronologique, division des Evangiles.

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Que signifient ces mots : l'Evangile, les Evangiles? I. Le sens du mot Evangile s'est modifié par l'usage, comme celui de Testament. Employé d'abord pour exprimer la bonne nouvelle de l'accomplissement des divines pro

Cette figure de Notre Seigneur, dessinée par Perret dans ses Catacombes et souvent reproduite, est prise d'une terre cuite, trouvée dans des fouilles pratiquées au-dessus du cimetière de Ste-Agnès. On conteste l'authenticité de l'œuvre, et plusieurs ne la croient pas antérieure à la fin du xve siècle; mais tout le monde s'accorde à louer la beauté de ce visage, son caractère noble, religieux, surhumain. 2 Supra, n. 1.

messes1, ou l'annonce de la rédemption du monde par les mérites du Sauveur 2, il servit bientôt à désigner les quatre livres inspirés qui nous retracent l'histoire de cette grande œuvre et ses diverses phases: l'incarnation du Fils de Dieu, sa prédication, son sacrifice. Cette dernière signification est aujourd'hui la plus commune.

II. Comme il importait souverainement de conserver un souvenir exact et certain de cet événement capital, Dieu a pris soin de l'entourer des garanties les plus sûres et des témoignages les plus convaincants. Il a voulu :

1° Que la vie de son Fils fût écrite peu de temps après sa mort, non par un auteur seulement, mais par quatre écrivains, dont deux, le premier et le dernier, étaient témoins oculaires des faits qu'ils rapportent, et les deux autres, compagnons de ses Apôtres.

2o Que ces écrits reçussent aussitôt la plus grande publicité; qu'ils fussent, non seulement lus dans une église avec solennité, mais répandus dans le monde entier, mis sous les yeux de tous, de ceux mêmes qui étaient les plus intéressés à les contredire et les plus aptes à les contrôler.

3o Que, dès leur apparition, ils fussent placés, par l'ordre des Apôtres et la pratique de l'Eglise, au même rang que les livres les plus vénérés de l'Ancien Testament, comme inspirés par le même esprit et réclamant la même foi".

4o Que les auteurs de ces livres, avec une multitude de pasteurs et de fidèles instruits par eux, consumassent leur vie et répandissent leur sang pour attester la vérité des faits qui y sont consignés.

Ainsi rien ne manque à l'autorité des saints Evangiles; et

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1 Ευαγγέλιον Ιησου Χριστου, γιου του Θεου. Marc., 1, 1 ; Rom., 1, 9. Cf. II Reg, iv, 10, Græce. 2 Luc., II, 10, 11. Deus in terra, homo in cœlis quid par esse potest? S. Chrys. In Matth., Hom. 1. — 3 Cf. Apoc., XIV, 6; S. Clem. Epist. Ila 8; Epist. ad Diog., XI, S. Justin., Ia Apol., 1, 66; Dial., 10. - 4 « Dieu a toujours gardé cet ordre admirable de faire écrire les choses dans le temps qu'elles étaient arrivées et que la mémoire en était récente. » Bossuet, H. U., 11, 27. - 5 Joan., viii, 17; Heb., x, 28. Supra, n. 3; Infra, n. 458. 6 AUTOTTα, Luc., x11. Cf. Deut., XVII, 6. 7 Supra, n. 23 et 24.

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109 il n'a pas fallu d'autre quadrige au Seigneur pour soumettre tous les peuples à son joug doux et léger1. »

40. Les titres donnés à chacun des Evangiles: selon S. Matthieu, selon saint Marc, etc., n'indiqueraient-ils pas qu'ils ont été rédigés après les Apôtres et suivant leur recit, plutôt que composés par eux?

On ne peut entendre les titres des Evangiles autrement que les entendaient les Pères de qui nous les tenons. Or, il est constant qu'on a toujours dit dans l'Eglise indifféremment Evangile de S. Matthieu ou Evangile de Notre-Seigneur selon S. Matthieu, etc.3.

Ce n'est pas pourtant que le sens de ces mots soit tout à fait identique. Quand on dit : l'Evangile de S. Matthieu, on entend l'écrit de S. Matthieu sur le Sauveur et sa prédication; et quand on dit l'Evangile selon S. Matthieu, on entend l'avènement du Sauveur et sa prédication décrits par S. Matthieu. Ainsi cette expression selon, secundum, xxx, fait entendre que l'Evangile a existé comme fait avant d'être rédigé par écrit, et qu'il a été écrit par plusieurs auteurs et de plusieurs manières, sans rien perdre de son unité objective. C'est dans ce sens que nous disons: L'Ancien Testament selon les Septante; le Nouveau Testament selon l'Italique, selon la Vulgate, etc.3.

41. Dans quel ordre et dans quel espace de temps les Evangiles ont-ils paru?

L'ordre selon lequel les Evangiles ont été publiés est marqué par le rang qu'ils occupent dans le Nouveau Testament; car la disposition actuelle de ces livres remonte aux premiers temps, et ne peut guère s'expliquer autrement. Si S. Jean, par exemple, avait écrit avant les synoptiques,

1 S. Aug., De consensu Evangelist., 1, 10. S. Hieron., Epist. LIII, 4, 5. On peut voir ce sujet parmi les sculptures de N.-D. de Brou. M. Rossi a publié, en 1871, une figure du même genre, détachée d'un sarcophage des premiers siècles: c'est Notre-Seigneur porté par un vaisseau qui a les quatre évangelistes pour rameurs. 2 Cf. Marc., 1, 1. S. Iren., I, xxvi, 2; III, 1 Clem., Strom., 1, 21. 3 Cf. S. Aug., Cont. Faust., xxxii, 2, On peut alléguer les premières versions, les Canons les plus anciens, le fragment de Muratori, S. Irénée, III, 1, 1; Origène, In Matth., 1. etc.

quelle raison aurait-on eue de le placer après eux ? Et si S. Marc avait écrit avant S. Matthieu, comment S. Matthieu ne viendrait-il pas après lui1? C'est du reste le témoignage bien exprès de la tradition 2.

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On sait que les Evangiles synoptiques ont paru dans un espace de vingt à vingt-cinq ans, de l'an 45 à l'an 65 environ, longtemps avant l'Evangile de S. Jean. S. Matthieu a écrit le premier, de très bonne heure, avant de quitter la Judée pour aller prêcher la foi parmi les Gentils . S. Marc a fait sa rédaction un peu plus tard, mais pourtant bien avant la mort de S. Pierre († 67). D'après Papias*, Clément d'Alexandrie, Tertullien, etc., son livre fut rédigé avec le concours, suivant la prédication et sous la direction du chef des Apôtres. Eusèbe et S. Jérôme disent que S. Pierre a donné sa sanction à cet ouvrage et qu'il en a autorisé la lecture pour toutes les Eglises. Le troisième Evangéliste, qui débute en disant qu'il existe déjà plusieurs écrits sur la vie de Notre-Seigneur, qu'il a pris tous les renseignements qu'il a pu, qu'il s'attachera à être complet et bien suivi, n'a écrit qu'après S. Marc. Cependant, il fait mention de son livre, au commencement des Actes, comme d'un ouvrage déjà publié. Or, les Actes ont été terminés visiblement avant l'an 67 et probablement vers 63 8. Cet évangile, comme celui de S. Marc, a donc été écrit du temps des Apôtres et approuvé par eux.

42.

Evangiles synoptiques leur caractère. Quelles raisons donnet-on des différences et des analogies qu'on remarque entre eux ?

9

I. Les Allemands ont donné le nom de synoptiques aux trois premiers évangiles, à cause d'une particularité qui leur

1 Infra, n. 62.

2 Canon de Muratori, A. T., n. 40.

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H., III, 39. 4 Euseb., Ibid. 5 Euseb., H., II, 14, 15; vi, 14, 25. 6 S. Hier., de Vir illust., 8, 9. 7 Luc., I, 1. 8 Eo tempore scripserunt Marcus et Lucas quo non solum ab Ecclesia Dei, sed ab ipsis adhuc in carne remanentibus apostolis, probari potuerunt. S. Aug., De consensu Evangel., Iv, 9; Tert., Ad Marcion., iv, 2, 5. Infra, n. 52, 53, 62, 63, 68, 475, 476, 557. - 9 Corrélatifs ou parallèles, de suvos, vue simultanée.

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est commune et qui les distingue de S. Jean. Ayant tous trois le même objet et suivant la même méthode, ils semblent marcher de front dans leurs récits, sur des lignes parallèles, de sorte qu'à toutes les époques de la vie du Sauveur, on en trouve au moins deux en regard l'un de l'autre pour s'éclairer et se soutenir.

II. Les Synoptiques se distinguent encore du quatrième évangile par d'autres caractères. Outre qu'ils sont d'un autre style', ils se proposent un autre but et se placent sur une autre scène.

1o Le dessein des Synoptiques est de faire connaître le divin Maître, ses œuvres et sa doctrine, toute sa doctrine sans distinction, afin de lui gagner des disciples. S. Jean se propose d'éclairer et de soutenir la foi de l'Eglise sur la divinité du Sauveur. Il a surtout en vue de réfuter ceux qui s'attaquaient à ce dogme. Ce but est manifeste, et l'auteur s'en explique clairement à plusieurs reprises 2.

2o Les Synoptiques s'attachent à retracer la prédication du Sauveur dans la Galilée, patrie des Apôtres, sans laisser ignorer néanmoins qu'il a fait plusieurs voyages et même plusieurs séjours à Jérusalem et aux environs 3. Ils nous le montrent occupé à former ses premiers disciples sur les bords du lac de Génésareth, à Capharnaum, près de Tibériade, à Nahim, à Bethsaïde; quelques fois dans la Décapole, à Gadare, à Césarée de Philippe; quelques fois dans la pérée : mais ils ne le suivent dans la Judée qu'une seule fois, à la

1 Infra, n. 71, 72.

2 Joan., xx, 31. Cf. 1, 7; III, 16; iv, 42; XII, 37.

3 Il suffirait de citer cette plainte du Sauveur à l'approche de sa Passion: Jerusalem, Jerusalem, quoties volui ! .. Matth., xx, 37; Luc., XIII, 34. Mais de plus S. Luc nous apprend qu'il faisait des voyages en Judée, Luc., x, 38-42, à Jérusalem, Luc., Ix, 51, etc., qu'il avait coutume de se retirer sur le mont des Oliviers, Luc., xxII, 36; Joan., xviii, 2. Nous voyons aussi qu'il comptait dans la ville des amis, Matth., xxvi, 18; XXVII, 57; Marc., xiv, 12; Luc., XIX, 32-34, et des disciples, Matth., iv, 25; XXI, 2; Marc., III, 7; Luc, vi, 17; xxII, 11, 12, qu'il y était connu du peuple, Matth., xx1, 38; Luc., XIX, 38, et des autorités, Matthr, xxvi, 3, 4; XXVII, 62, 63. Dans les six derniers mois de sa vie, Jésus vint trois fois à Jérusalem, en octobre, décembre et mars, pour la fête des Tabernacles, pour celle de la Dédicace et pour celle de Pâques.

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