la dignité. L'homme en s'unissant à la femme ne fait que. reprendre une partie de sa substance; son âme ainsi que son corps sont incomplets sans elle : il a la force, elle a la beauté; il combat l'ennemi et laboure le champ de la patrie, mais il n'entend rien aux détails domestiques; il a des chagrins, et sa compagne est là pour les adoucir. Sans la FEMME, il serait rude, grossier, soli= taire. La FEMME suspend autour de lui les fleurs de la vie, comme ces lianes des forêts qui décorent le trone des chênes de leurs guirlandes parfumées. Enfin, l'époux chrétien et son épouse vivent, renaissent, meurent ensemble; ensemble ils élèvent les fruits de leur union, en poussière ils retournent ensemble, et ils se retrouvent ensemble par delà les limites du tombeau. (Chateaubriand.) Les Pères de l'Église et le mariage. 2. Dans les premiers siècles du christianisme, quelques Pères de l'Église, infatués d'un faux principe emprunté des païens, qui avaient reconnu l'excellence du célibat, préféraient cet état à celui du mariage. Quelques-uns d'entre ces saints docteurs ont outré leurs idées sur cette matière jusqu'à dire que le mariage était un usage illégitime et impur. Mais assurément, il n'y eut jamais rien dans l'Écriture qui puisso autoriser une opinion si extravagante. Et même j'ose dire (faisant abstraction du pouvoir invincible de la grâce) que le mariage est le seul moyen de conserver la chasteté, et que c'est l'unique remède aux feux de la concupiscence; car tout le monde n'est pas de l'humeur d'un saint visionnaire: c'est, si je ne me trompe, le bon François d'Assise, patron des gueux, lequel se vautrait dans la neige pour arrêter certains mouvements impétueux de la chair et pour garantir la robe de chasteté des flammes du plaisir. Quelle chaleur dans un moine ! Les hommes et les FEMMES pris séparément ne sont pour ainsi dire que des créa= tures imparfaites, et comme une moitié les unes des autres. L'humanité divisée en deux sexes n'est proprement entière que par l'union de tous les deux. Chaque sexe a reçu certains mérites d'agrément qu'il doit à l'autre sexe, et c'est cette com= munication mutuelle de beautés particulières qui fait la beauté générale de la nature. De là vient cette pente presque invincible que nous avons à nous faire part des grâces qui nous embellissent. Celui qui les possède n'en est point touché, parce qu'il doit aspirer à d'autres; mais celui qui les voit en est charmé, parce qu'elles lui sont propres, et qu'elles ne sont faites que pour lui. Ce jeu de la nature, qui ne nous a séparés que pour nous rapprocher de plus près, est aussi ancien qu'ellemême ; et l'on a toujours vu les deux sexes se redemander l'un à l'autre cette por= tion d'eux-mêmes qui leur manque, et se sommer réciproquement de se commu= niquer leurs perfections, pour ne faire tous ensemble qu'un seul corps d'humanité qui puisse augmenter ses forces par son union, et étendre sa durée par ses forces. Je ne doute point que les Pères de l'Église qui ont tant clabaudé contre le mariage n'aient senti, comme nous, ces impressions secrètes de la nature, qui devaient les obliger à parler tout autrement qu'ils n'ont fait Mais, entre nous, peut-être que par des expressions qui paraissent et qui sont en effet si dures, ils ont seulement voulu dire: Qu'on fait mieux son affaire Sans l'avis d'un curé ni le seing d'un notaire. FR. BRUYS. Mission de la FEMME. 3. Il n'existe pas d'époque, si reculée qu'elle soit, où l'esprit humain n'ait dirigé ses investigations sur le caractère et sur la mission des FEMMES. Longtemps on s'est contenté d'un coup d'œil rapide, jeté de haut en bas, et qui ne rapportait à l'observateur qu'une image superficielle, empreinte de préjugés autant que de vérité. En émancipant les FEMMES, en donnant plus de liberté, plus de spontanéité à leurs mouvements, le progrès des lumières leur a fait une plus grande place dans la société, et les a rendues l'objet d'études plus sérieuses. Durant tout le règne du paganisme (et ceci s'applique au paganisme moderne comme au paganisme de l'antiquité), les FEMMES furent dans le monde comme n'y étant pas. Exclues de la famille, ou n'y remplissant qu'un rôle subalterne; exclues des œuvres littéraires, ou y apparaissant seulement avec leurs attraits physiques; traitées en esclaves, se courbant habituellement sous la volonté sèche et rude de leurs maîtres ou de leurs maris, elles ne virent qu'un but à leur vie : plaire et obéir. Comme les affections n'avaient pas subi l'influence régénératrice du christia= nisme, comme les volontés ne s'étaient pas veloutées, pour ainsi dire, dans l'atmo= sphère d'une religion sainte, la nécessité resta dure, farouche, et le but, au lieu de purifier l'âme de la FEMME, tendit à la corrompre en développant toutes ses passions sensuelles. Loin de considérer les FEMMES en sœurs, en amies destinées à partager les peines, les joies de l'existence et l'éternel avenir; loin de les regarder comme des êtres plus faibles, mais complémentaires, si l'on peut ainsi s'exprimer, on ne vit en elles que les passifs instruments d'une félicité plus ou moins brutale, et les hommes ne leur accordèrent dans leur cœur qu'une place analogue à celle que te= naient dans leur vie les heures de passion et de frivolité. Nullité de la FEMME, nous dirions presque absence de la FEMME; ici et là quelques flatteries s'adressant aux qualités extérieures; nulle part l'analyse touchante de ces facultés du cœur essentiellement féminines, qui s'épanouissant dans le mystère de la famille, comme la violette dans la nuit que lui fait sa feuille, vont parfumant tout ce qui les entoure; pas un examen sérieux, pas une recherche motivée par un intérêt sincère; de temps à autre l'exaltation de ces vertus roides et antipathiques qu'on appelle les vertus romaines; plus souvent l'exaltation de ces vices colorés, empreints d'une grâce corrompue, qu'on célébrait aussi chez les courtisanes, et dont la Grèce semblait posséder les types les plus séduisants; voilà ce que nous offre le paganisme. Avec la foi chrétienne naquirent d'autres besoins, d'autres idées et d'autres faits. In de ses premiers actes fut de rendre à la FEMME son influence et sa dignité. Appe= lées au salut, les FEMMES sentireut le germe de l'immortalité se réchauffer en elles. Les hommes, arrachés à leurs déportements, et par une loi précise, et par leur conscience, qui se réveillait pour sanctionner cette loi, les hommes se tournèrent vers celle qui devait être leur compagne durant le voyage d'ici-bas ils lui deman= dèrent autre chose que l'éclat des dons physiques, autre chose que l'obéissance for= cée; ils voulurent d'elles le renoncement que dicte la tendresse, l'appui que prète l'union dans une même et divine croyance. La sainteté divine de la loi juive avait produit la gravité de l'union conjugale et son élévation dans une mesure inconnue aux peuples païens; la pureté et la puissance du christianisme donnèrent la pureté et la puissance du mariage dans des proportions cent fois plus parfaites et plus grandes. La FEMME, comme épouse et comme mère, exerça sur l'humanité une ac= tion bénie, et dans le cercle de la famille un apostolat dont la Bible, dont les annales chrétiennes nous révèlent l'importance. Mais les bouleversements qui accompagnèrent l'établissement de la foi nouvelle, le reste de paganisme dont ne purent entièrement se dépouiller les nations qui en avaient si longtemps suivi les rites, l'opposition naturelle de cette chair, qui depuis le commencencement est inimitié contre Dieu, tout cela montant ainsi qu'une fu= mée épaisse, ternit vite l'éclat du soleil levant. (Mme Gasparin.) .... Les cœurs généreux se dévouent au mariage comme à la navigation. 4. Vous n'avez jamais eu envie de vous marier, monsieur de Servian? - Jamais, madame; j'ai longtemps réfléchi sur le mariage, et j'ai admis invin= ciblement que la tranquille association de deux existences était un fait impossible dans sa continuité. Un homme apporte à la communauté sa force, sa domination, sa gravité, son caractère anguleux; une FEMME apporte sa faiblesse, sa légèreté, sa soumission, ses caprices enfantins, son caractère arrondi. Ces éléments opposés ne peuvent faire un tout viable; au premier pas, il y a choc, violente secousse, anta= gonisme, perturbation. Voilà ce que tous les esprits sérieux ont reconnu. Une chose à considérer, madame, la voici. Tous les hommes qui ont senti en eux gronder la voix d'une vocation quelconque ne se sont pas mariés. Dans les temps antiques, les hommes de génie ont voué un culte au célibat. Platon, Homère, Vir= gile, Horace, ces premiers flambeaux du monde, sont morts garçons, et les cris de leurs enfants ne les ont jamais distraits de leurs ouvrages. Socrate seul a voulu faire exception, et il s'est repenti: sa FEMME l'a tué avant la cigüe. Les deux plus grands capitaines de l'antiquité ont honoré le célibat: Alexandre et Annibal ont conquis le monde parce qu'ils étaient garçons. César, après avoir soumis les Gaules, étant célibataire, se maria, et les soucis du ménage ayant altéré sa raison, il fut assassiné. On sait, d'ailleurs, et lui-même en a fait un proverbe, on sait que la conduite de la FEMME de César a été l'objet de violents soupçons. Vos grands poètes, vos grands publicistes, vos historiens anglais sont purs de mariage. Byron a essayé; nous sa= vons ce qui est advenu. Le mariage est un admirable élément bourgeois qui féconde les villes; le célibat est un élément noble qui féconde les esprits. Mon Dieu! comme vous avez étudié la question, monsieur de Servian! dit Lavinia en joignant ses mains; quel bonheur pour vous d'avoir eu un père de l'élé= ment bourgeois ! Dieu me garde de manquer de respect à cette cendre. Seulement, je vous fais observer que votre père n'a pas honoré le célibat comme Alexandre et Annibal : c'est ce qui vous procure en ce moment l'avantage d'exalter les héros antiques morts garçons. Mon père, madame, a lutté longtemps. Les malheurs de l'émigration l'ont poussé au mariage. D'ailleurs, mon père avait la frivolité charmante de sa nation. Il dédaignait les choses sérieuses et les études substantielles. C'était un gentilhomme français dans toute l'acception du mot. Il suivait des traditions de famille. Les FEMMES ont occupé sa vie, et le devoir de son fils est d'effacer par une conduite nouvelle bien des souvenirs encore vivants à Dublin. Je connais mes obligations, je les remplirai. Ma ligne est toute tracée dans le sillon que suivent les esprits sérieux. Et alors, monsieur de Servian, les esprits sérieux ne se marient pas? On a vu, madame, des esprits sérieux se marier: mais dans un noble but, dans une intention toute philosophique. Ceux-là se sont dévoués pour étudier le mariage avec leurs propres yeux, et faire servir leur expérience personnelle à la cause de l'humanité conjugale. Ames d'élite qui ne se dissimulaient point les périls de l'entreprise, et bravaient les orages de l'hymen pour les signaler à l'univers. Ainsi de hardis navigateurs se lancent sur une mer inconnue pour en découvrir les écueils à leurs risques et périls, et les faire remarquer aux pilotes qui vogueront sur les mêmes flots. Les cœurs généreux se dévouent au mariage comme à la naviga= tion..... (Méry.) Des devoirs des époux. 5. Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours et assistance. Le mari doit protection à sa FEMME, et la FEMME obéissance à son mari. Voilà toute la morale des époux. On a longtemps disputé sur la préférence ou l'égalité des deux sexes. Rien de plus vain que ces disputes. La différence qui existe dans leur être en suppose dans leurs droits et dans leurs devoirs respectifs. Sans doute, dans le mariage, les deux époux concourent à un objet commun, mais ils ne sauraient y concourir de la même manière. Ils ne peuvent partager les mêmes travaux, supporter les mêmes fatigues ni se livrer aux mêmes occupations. Ce ne sont point des lois, c'est la nature même qui a fait le lot de chacun des deux sexes. La FEMME a besoin de protection, parce qu'elle est la plus faible; l'homme est plus libre, parce qu'il est le plus fort. La prééminence de l'homme est indiquée par la constitution même de l'homme, qui ne l'assujétit pas à autant de besoins, et qui lui garantit plus d'indépendance pour l'usage de son temps et pour l'exercice de ses facultés. Cette prééminence est la source du pouvoir de protection que la loi reconnaît dans le mari. L'obéissance de la FEMME est un hommage rendu au pouvoir qui la protége, et elle est une suite nécessaire de la société conjugale, qui ne saurait subsister si l'un des époux n'était subordonné à l'autre. Le mari et la FEMME doivent incontestablement être fidèles à la foi promise; mais l'infidélité de la FEMME suppose plus de corruption et a des effets plus dangereux que l'infidélité du mari: aussi l'homme a-t-il été jugé moins sévèrement que la FEMME. Toutes les nations, éclairées en ce point par l'expérience et par une sorte d'instinct, se sont accordées à croire que le sexe le plus aimable doit encore, pour le bonheur de l'humanité, être le plus vertueux. Les FEMMES Connaîtraient peu leur véritable intérêt si elles pouvaient ne voir dans la sévérité apparente dont on use à leur égard qu'une rigueur tyrannique plutôt qu'une distinction honorable et utile. Elles ont reçu du ciel cette sensibilité douce qui anime la beauté, et qui est sitôt émoussée par les plus légers égarements du cœur; ce tact fin et délicat qui ne se conserve ou ne se perfectionne que par l'exercice de toutes les vertus; enfin cette modestie touchante qui triomphe de tous les dangers, et qu'elles ne peuvent perdre sans devenir plus vicieuses que nous. Ce n'est donc point dans notre injustice, mais dans leur vocation naturelle, que les FEMMES doivent chercher le principe des devoirs plus austères qui leur sont imposés pour leur plus grand avantage au profit de la société. (Portalis.) Respect du lien conjugal. 6. C'est dans le mariage que la sensibilité est un devoir dans toute autre relation la vertu peut suffire; mais dans celle où les destinées sont entrelacées, il semble qu'une affection profonde est presque un lien nécessaire..... Un ami du même âge, auprès duquel vous devez vivre et mourir, un ami dont tous les intérêts sont les vôtres, dont toutes les perspectives sont en commun avec vous, y compris celles de la tombe, voilà le sentiment qui contient tout le sort. Quelquefois, il est vrai, vos enfants, et plus encore vos parents, deviennent vos compagnons dans la vie; mais cette rare et sublime jouissance est combattue par les lois de la nature, tandis que l'association du mariage est d'accord avec toute l'exis= tence humaine. D'où vient donc que cette association si sainte est si souvent profanée? J'oserai le dire, c'est à l'inégalité singulière que l'opinion de la société met entre les devoirs des deux époux qu'il faut s'en prendre. Le christianisme a tiré les FEMMES d'un état qui ressemblait à l'esclavage. L'égalité devant Dieu étant la base de cette admirable religion, elle tend à maintenir l'égalité des droits sur la terre; la justice divine, la seule parfaite, n'admet aucun genre de priviléges, et celui de la force encore moins qu'aucun autre. Cependant il est résulté de l'esclavage des FEMMES des préjugés qui, se combinant avec la grande liberté que la société leur laisse, ont amené beaucoup de maux. On a eu raison d'exclure les FEMMES des affaires politiques et civiles; rien n'est plus opposé à leur vocation naturelle que tout ce qui leur donnerait des rapports de rivalité avec les hommes. Mais si la destinée des FEMMES doit consister dans un acte continuel de dévouement à l'amour conjugal, la récompense de ce dévouement, c'est la scrupuleuse fidélité de celui qui en est l'objet. La religion ne fait aucune différence entre les devoirs des deux époux. Mais le monde en établit une grande; et de cette différence naît la ruse dans les FEMMES et le ressentiment dans les hommes. Quel est le cœur qui peut se donner tout entier sans vouloir un autre cœur aussi tout entier ? Qui donc accepte de bonne foi l'amitié pour prix de l'amour? Qui promet sincèrement la constance à qui ne veut pas être fidèle ? Sans doute la religion peut l'exiger; mais qu'il est injuste l'échange que l'homme se propose de faire subir à sa compagne ! Il y a dans un mariage malheureux une force de douleur qui dépasse toutes les peines de ce monde. L'âme entière d'unc FEMME repose sur l'attachement conjugal : lutter contre le sort, s'avancer vers le cercueil sans qu'un ami vous soutienne, sans qu'un ami vous regrette, c'est un isolement dont les déserts de l'Arabie ne donnent qu'une faible idée; et quand tout le trésor de vos jeunes années a été donné en vain; quand vous n'espérez plus pour la fin de la vie le reflet de ces premiers rayons; quand le crépuscule n'a plus rien qui rappelle l'aurore, et qu'il est pâle et décoloré comme un spectre livide, avant-coureur de la nuit, notre cœur se révolte, il nous semble qu'on l'a privé des dons de Dien sur la terre; et si vous aimez encore |