Page images
PDF
EPUB

2. Que conclurre de-la? Si Dieu vous donne la force de vous en paffer, & qu'il y fuplée par lui-même ou par quelque autre moyen, ne me) voyez plus. Vous devez en faire l'ef fai, & fuivre Dieu; car il ne faut nullement s'attacher à la créature.

Si vous fentez que vous en avez un vrai befoin; & que Dieu vous pouffe à y venir, venez-y avec courage, & ne craignez rien; car je n'ai rien à perdre ni à ménager.

[ocr errors]

3. Je ne crains que Dieu, & nullement les hommes: je n'attends ni ne demande nul fecours des hommes: c'est pourquoi je n'ai que faire de mé нagement pour leur plaire. Agiffez: donc conformément à cela, fans géne & fans retours. Si vous vous trou vez en paix en ne me voyant pas, demeurez en votre paix, & ne vous faites point une néceffité de me voir: fi vous vous trouvez ou affoiblie ou trou blée, venez, venez fans crainte; & je vous recevrai de tout mon cœur. C'eft ce que vous peut dire celle qui eft & qui fera toujours en Dieu la même pour vous malgré la malice des hommes, à moins que vous ne chan

LETTRE CXXXVI.

Combien le peu d'ouverture de cœur qu'on a envers les perfonnes dont Dieu fe fert comme d'inftrumens' pour notre bien, les abat, aflige l'Esprit de Dieu en elles, & nous les rend inutiles. Leur défintéressement en cela.

1.

N. eft parti de grand matin. Je

vous dirai, en vous parlant férieufement, que je crois n'être plus bonne à aider perfonne; car je l'ai vû avec lui. Mon cœur n'a eu nulle correfpondance, quoique je l'aime tendrement, que je le connoiffe bon & droit, &, à fon attache près, bien meilleur que moi. Dieu fe fert quelques fois des perfonnes un certain tems; puis il ne veut plus s'en fer

vir.

2. Ce feroit une proprieté fi je voulois encore aider aux autres dorfque Dieu ne veut plus fe fervir de moi. J'ai voulu quelques fois refter auprès de lui en filence; j'étois comme repouffée ce qui m'a fait croire, que

[ocr errors]
[ocr errors]

le mal eft en moi plutot qu'en lui. Qu'on ne vienne plus chercher un chien mort, plus propre à gâter l'ouvrage de Dieu qu'à y contribuer. Je vous le dis comme je le pcufe & nullement par humilité. Si j'étois humble, j'aurois quelque bien; & je me vois deftituée de tout: ainfi je ne parle que par vérité. Ne vous arrêtez donc plus à une miferable. Vous avez Moife, vous avez les Prophêtes; & par deffus tout cela vous avez JéfusChrist.

3. C'eft entre fes mains que je vous remets tous, & en celles de N. qui a la lumiere & le caractère. Tournez tous de ce côté là: il y a longtems que je le fouhaite. Je vous en prie à préfent, perfuadée que Dieu ne veut plus que je vous conduife; mais qu'on fera mieux conduit par des inftrumens que Dieu choifira: non que je croye que Dieu ait befoin de nous, & de ce qui eft en nous; mais il mettra lui même ce qu'il faut. Car nous fommes des inftrumens inutiles. Dien donne à l'inftrument tout le prix. Il faut le laiffer fe fervir de l'inftrument tant qu'il lui plait, & le quiter

[ocr errors]

6 1

lorfqu'il le juge à propos. C'est ma difpofition. Ecrivez-moi comme un ami: mais pour le confeil fuivez votre cœur ; je ne parle pas de fon penchant naturel, qui ne peut rien vouloir de bon; mais de l'intime du cœur. Je vous embraffe en Nôtre Seigneur.

[ocr errors]

LETTRE CXXXVII.

4

Véritable défiterelement d'une ame qui fert purement Dieu.

I. (a)

M

On témoin eft au ciel, & mon (b) juge eft au plus hant des Cieux. Si Dieu vous met en doute, je ne prétends point vous affurer Je vous ai toujours dit que je ne garantiffois pas de n'être point trompée; mais que mon deffein n'étoit pas de tromper. J'ai toujours parlé avec ingénuité & fimplicité. Je ne me fuis point déguifée. J'ai laiffe paroitre toutes mes foibleffes. Je n'ai point voulu qu'on me crut bonne. J'ai plus parlé en me taifant qu'en parlant. Je n'ai jamais cherché ni mon avantage, ni

(a) Job. 16. vf. 20. (b) Confcius; celui qui connoit le fond de mon cœur.

ma gloire. Je n'ai flatté perfonne. Je n'ai rien demandé. C'est à vous-même à juger ce que j'ai pû faire pour vous tromper, & par quel endroit. Du ref te, je fuis peu exacte dans mes lettres; paree que j'ai apris d'écrire fimplément à des perfonnes qui m'entendent à demi-mot, & que je ne croy ois pas écrire pour le public.

2, Je ne demanderai point à Dieu qu'il vous railure fur moi : car s'il veut que vous foyez tous fcandalifes en moi, j'y confens. Ce n'eft point à pfent le tems des demandes pour moi, mais des facrifices. Peut-être ne veut-il plus fe fervir de moi. C'est yn inftrument ufé. Qu'il le brûle: je ne lui dirai pas qu'il s'en ferve. J'ai pû être trompée; mais je n'ai jamais voulu tromper & lorfqu'il m'eft venu quelques momens de peines & de retours involontaires fur la confiance dont vous m'honorez, j'ai toujours. eû cette ferme foi, que fi j'étois trou

pće, vous étiez trep droit pour que Dieu ne vous le fit pas connoitre. Ainfi, laiffez- vous à fa lumiere: ne. la combattez point. Si Dieu m'a rejettée, je me rejette moi-même ; & je

« PreviousContinue »